«Yahndawa’: ce que nous sommes»: une pièce rafraîchissante et touchante
Yahndawa’: ce que nous sommes, présentée au Théâtre du Trident, se distingue par sa façon rafraîchissante et pertinente de présenter les effets qu’a eus la colonisation sur la communauté de Wendake.
Rares sont les fois, et avec raison, où le sujet de la colonisation des peuples autochtones est abordé sans qu’on ne parle des pensionnats. Yahndawa’: ce que nous sommes, écrite par Marie-Josée Bastien et mise en scène par Véronika Makdissi-Warren, amène la discussion ailleurs.
On y suit l’histoire d’une famille wendate au fil de six générations. Le fait que les différentes générations communiquent entre elles tout au long de la pièce donne droit à plusieurs échanges corsés concernant les priorités d’autrefois par rapport à celles d’aujourd’hui.
Dès les premières minutes, Ludger Sarenhes Bastien (Charles Bender), un homme d’affaires prospère, et son arrière-arrière-arrière-petit-fils Agnolien (Andawa Laveau) ont une prise de bec au sujet de la protection de la rivière Saint-Charles dans les années 1900. Le plus jeune reproche à son ancêtre d’avoir voulu protéger le cours d’eau face à la Ville de Québec pour faire profiter son industrie plutôt que par souci de la nature. Ce dernier ne s’en cache pas, mais explique qu’il voulait avant tout éviter de perdre ce qu’il avait bâti pour sa famille au profit des Blancs. Sur scène, c’est un dialogue de sourds. Mais, comme spectateur, ça nous permet rapidement de saisir l’ampleur du dilemme qu’ont vécu les Wendats entre le respect de leurs traditions et l’obligation qu’ils ont eue de s’adapter au monde allochtone.
On le constate également lorsque l’une des descendantes décide de renoncer à son statut «d’Indienne», comme c’était inscrit dans la loi, en mariant un homme blanc. Ou encore, de façon plus moderne, quand la jeune Yandicha (Océane Kitura Bohémier-Tootoo) se fait étiqueter comme une «Indienne de plastique» par ses pairs parce qu’elle s’éloigne de plus en plus de ses racines tout en continuant de profiter des avantages financiers de son statut d’Autochtone.
Ces débats font la beauté de la pièce, car ils mettent en lumière un déchirement identitaire qui est encore bien présent dans les communautés et dont on entend peu parler.
Léger bémol, comme ils ne sont que six acteurs pour la vingtaine de personnages présentés au fil des générations, ça peut être mêlant par moment. On réussit néanmoins toujours à se replacer somme toute rapidement, sans perdre le fil.
La pièce Yahndawa’: ce que nous sommes est présentée au Théâtre du Trident jusqu’au 30 novembre.