Homicide involontaire d’un patient: une ex-médecin assure avoir suivi les règles
Une ex-anesthésiologiste de Laval accusée de l’homicide involontaire d’un octogénaire assure avoir dû prodiguer des soins de fin de vie au patient directement dans la salle d’opération parce qu’il ne voulait pas «d’acharnement thérapeutique» et qu’il était impossible de le transférer aux soins intensifs.
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«De quel droit je me donnerais l’autorisation de poursuivre des traitements auxquels le patient n’a pas consenti?» s’est questionné Isabelle Désormeau lors de son témoignage mardi au palais de justice de Saint-Jérôme.
L’ex-médecin subit actuellement son procès en lien avec le décès de Raymond Bissonnette, 84 ans, le 1er novembre 2019 à l’hôpital Cité-de-la-Santé de Laval.
La veille, M. Bissonnette s’était présenté à l’urgence pour des maux de ventre.
En salle d’opération, le Dr Hubert Veilleux a découvert de la nécrose sur son intestin grêle. Cela a mis un terme aux procédures chirurgicales, comme l’avait signifié M. Bissonnette avant le début de l’intervention.
Isabelle Désormeau a indiqué avoir entendu le chirurgien appeler la nièce du patient. Il s’agissait de sa personne-ressource comme la fille de la victime a un handicap intellectuel.
Le Dr Veilleux avait toutefois témoigné ne pas avoir de souvenir de l’accusée à proximité lors de cette conversation.
«Il voit que je suis là, il me fait signe “non”, en voulant dire que la famille ne viendra pas», a quant à elle affirmé l’ex-anesthésiologiste.
Comme il était très tôt le matin, Line Bissonnette, qui préparait déjà les funérailles de son père, ne voyait pas l’«urgence» d’aller à l’hôpital, avait-elle témoigné, précisant que le chirurgien lui avait indiqué que son oncle avait de quelques heures à deux jours à vivre.
Soins palliatifs
Le Dr Veilleux et Mme Bissonnette ont ensuite convenu de refermer la paroi abdominale et d’offrir des soins palliatifs.
Pour Isabelle Désormeau, l’objectif des soins palliatifs est «de cesser tout traitement qui n’est pas destiné à soulager le patient ou lui procurer du bien-être. Tout traitement actif qui n’a pas cet objectif doit être cessé».
Elle estimait donc que de maintenir la ventilation mécanique et l’intubation était de «l’acharnement thérapeutique», ce que M. Bissonnette avait refusé avant d’entrer au bloc opératoire.
Isabelle Désormeau a indiqué que M. Bissonnette était «maintenu en vie artificiellement» et était en «choc septique évolutif».
En salle d’opération
Le plan initial était de transférer le patient aux soins intensifs. Or, l’intensiviste de garde aurait mentionné que ce n’est «pas un mouroir» et aurait refusé le transfert, selon Mme Désormeau.
L’accusée et son collègue auraient alors convenu que «les soins palliatifs allaient se faire en salle d’opération», a-t-elle témoigné.
Il s’agissait du premier arrêt de soin prodigué par Isabelle Désormeau en 24 ans de pratique.
L’ex-anesthésiologiste a administré du midazolam, du propofol et du fentanyl à M. Bissonnette, avant de lui donner une deuxième dose d’anesthésique quelques minutes plus tard «dans l’unique intention de poursuivre la sédation pour le confort du patient jusqu’à la fin».
Le décès de l’octogénaire a été constaté dans la salle d’opération par Isabelle Désormeau à 5 h 04.
Elle a démissionné de son poste une semaine plus tard lors d’une rencontre avec la direction «où les dés étaient jetés».
Le contre-interrogatoire d’Isabelle Désormeau se poursuivra mercredi devant le juge Marc-André Dagenais.
– Avec Laurent Lavoie