Crise en Syrie: «La situation va demeurer instable», selon un ancien ambassadeur du Canada

Bien qu’il croie que le chef du groupe de rebelles qui a causé la fuite du président Bachar al-Assad soit bien accueilli à Damas, l’ancien ambassadeur du Canada Ferry de Kerckhove est d’avis que la Syrie demeurera instable malgré le nouveau régime.
• À lire aussi: Syrie: le chef des rebelles veut stabiliser le pays
• À lire aussi: Syrie: qui est Abou Mohammad al-Jolani, le chef islamiste de la coalition rebelle à l’origine de la fuite de Bachar al-Assad?
• À lire aussi: Les Syriens célèbrent la chute de Bachar al-Assad
Celui qui a notamment occupé le poste de haut-commissaire du Canada auprès de la République islamique du Pakistan explique en entrevue à LCN que cette attaque du groupe Hayat Tahrir al-Sham (HTS), ex-branche d’al-Qaïda en Syrie, a réussi là où plusieurs autres ont échoué.
«C’est assez extraordinaire, dit-il. Je ne me l’explique pas très bien déjà maintenant. C’est une offensive qui a été menée remarquablement par le groupe HTS, un groupe religieux en même temps qu’un groupe civil.»
«Au point de vue [de la] réussite, c’est assez remarquable. Mais ça montre aussi la faiblesse profonde du régime qui se croyait en place pour toujours, ajoute-t-il. Je crois que la victoire rapide de ce groupe-là montre combien, au fond, le système de Bachar al-Assad était dans une situation délicate.»
C’est pourquoi il croit qu’il sera complexe de stabiliser le pays.
«En dépit de la présence de Bachar al-Assad, la Syrie a toujours été dans un état de volatilité avec des contrôles énormes, mais avec absolument aucune unité sur le plan national, avec en plus des interventions de la Turquie qui veut guider la Syrie, parce qu’il y a des Kurdes dans le nord de la Syrie», avance-t-il.
«Bref, la Syrie, qui est un pays merveilleux […] maintenant, c’est devenu un ensemble de bastions de différents éléments, continue-t-il. La vraie question qu’on se pose, c’est s’il pourrait y avoir une stabilité émanant d’al-Jolani et du groupe HTS? Je crois que le début de ce qu’on entend permet d’en rêver peut-être, mais la situation va demeurer instable.»
Plusieurs pays ou organisations comme l’Iran, la Turquie, le Hezbollah et Israël, qui a d’ailleurs déjà commencé à tirer sur certaines cibles, ont des intérêts en Syrie, ce qui compliquera la tâche du chef du HTS, Abou Mohammad al-Jolani.
Ce dernier a cependant bien paru lors d’une première entrevue à CNN, dimanche matin, à la suite de l’attaque.
Cela pourrait faire en sorte, selon M. Kerckhove, qu’il obtienne des appuis importants qui pourraient donner lieu à une lueur d’espoir concernant la stabilité au pays.
«La suite est extraordinairement intéressante, dit-il. Je crois qu’il y a un tel ras-le-bol dans l’ensemble de la communauté syrienne que je crois que ce brave al-Jolani […] aura la confiance, dans la mesure où c’est un vrai Syrien qui a réussi le combat. Et c’est important dans un contexte comme celui-là d’avoir gagné contre Assad.»
«Je crois qu’il aura l’immunité, et on voit déjà le premier ministre qui soutient al-Jolani maintenant, renchérit-il. Alors, je ne veux pas être naïf, et je sais qu’il va y avoir un tas de jeux d’influence avoisinants, mais je crois que pour l’instant, on part sur une meilleure voie que ce que c’était avant-hier.»
Voyez l’entrevue complète dans la vidéo ci-dessus.