Chaos au Mexique lors du concert d’un chanteur proche des narcotrafiquants

Un concert d’un chanteur connu pour ses ballades encensant les narcotrafiquants au Mexique a viré à l’émeute vendredi soir quand l’artiste a annoncé qu’il n’interpréterait pas ces chansons conformément à la loi, ont indiqué samedi son représentant et les médias.
L’incident a eu lieu dans la ville de Texcoco, dans l’État de Mexico (centre), pendant le concert de Luis R. Conriquez, dont plusieurs chansons font l’apologie des dirigeants du cartel de Sinaloa.
Des images vidéo diffusées par la presse et par des spectateurs montrent le chanteur expliquer au public, sous les huées, qu’il n’interpréterait pas ces «narcocorridos» («narcoballades»). «C’est une loi qu’il faut respecter, dit-il. Moi aussi je me sens mal de ne pas vous chanter ce que vous voulez écouter».
Le public furieux commence alors à lancer des objets en direction de la scène, à la suite de quoi le chanteur et ses musiciens quittent la salle sous les quolibets et les projections en tout genre. Une vingtaine de spectateurs se précipitent alors sur la scène et démolissent instruments de musique, écrans et équipements de son, avant une mêlée avec les vigiles venus les en empêcher.
L’imprésario du chanteur, Freddy Pérez, a expliqué sur Instagram que Conriquez avait obtempéré à un ordre des autorités de ne pas chanter de «narcocorridos». La situation «a viré à l’agression violente contre notre artiste, ses musiciens et son équipe de travail», a-t-il raconté.
Le gouvernement de l’État de Mexico a confirmé l’incident, précisant qu’il n’y avait pas eu de blessés, et a répété son appel aux municipalités pour qu’elles empêchent toute «apologie de la violence, ou référence à des personnages liés à des actes criminels ou à la consommation de stupéfiants» lors de spectacles.
La popularité croissante des «narcocorridos», ainsi que de ses variantes appelées «tumbados» ou «bélicos», est un phénomène qui inquiète les autorités mexicaines, y compris la présidente Claudia Sheinbaum qui a lancé en riposte un concours binational de musique «pour la paix et contre les dépendances» destiné aux jeunes du Mexique et des États-Unis.
Fin mars, le groupe local mexicain «Los Alegres del Barranco» avait fait scandale en projetant, lors d’un concert à Guadalajara (ouest), des images à la gloire d’«El Mencho», le chef présumé du cartel Jalisco Nueva Generacion (CJNG). Le département d’État américain avait par la suite annulé les visas de travail et de tourisme accordés aux membres de ce groupe par les États-Unis.
Outre celui de Mexico, d’autres États, dont ceux de Nayarit (ouest), Basse-Californie (nord-ouest), Chihuahua (nord) et Quintana Roo (sud-est), de même que plusieurs municipalités à travers le pays, ont interdit ce type de chanson.
«Absurde» d’interdire les «narco-chansons» selon la présidente
Les chansons à la gloire des cartels, ou comment s’en débarrasse : la présidente Claudia Sheinbaum a jugé lundi qu’il était «absurde» d’interdire ce genre très populaire au Mexique, préférant le «consensus» pour «que les paroles ne fassent pas l’apologie des drogues».
La présidente Sheinbaum a condamné la violence survenue lors du concert de Luis R. Conriquez, mais a affirmé que son gouvernement s’oppose à la censure d’un style musical.
«Nous n’interdisons pas un genre musical, ce serait absurde. Nous proposons que les paroles ne fassent pas l’apologie des drogues, de la violence, de la violence contre les femmes ou de voir les femmes comme des objets sexuels.»
«Notre position est de construire un consensus social qui ne doit pas faire l’apologie de la violence. Nous faisons référence aux chansons, mais aussi aux séries télévisées», a-t-elle ajouté.